Petite histoire de la colonisation catholique de la Bretagne

Cet été, je suis retourné voir le Menhir christiannisé de Saint Uzec. Je n’y étais pas retourné depuis de nombreuses années. Le descriptif m’a étonné :

Ce monument mégalithique est christianisé en 1674 lors d’une Mission de « l’apôtre de la Bretagne », le père jésuite Julien Maunoir qui le fait insérer dans un enclos ayant un accès par échalier, le fait peindre, sculpter et surmonter d’une croix. La christianisation des « pierres dressées » témoigne d’une volonté d’assimilation des signes religieux antérieurs1.

La date de 1674 m’a semblé très tardive pour une campagne de christianisation alors que la Bretagne est souvent présentée comme terre éternelle du catholicisme. Comment la colonisation catholique s’est elle mise en place ? Comment le colon a-t-il tué les anciens dieux, les anciennes croissance, les savoirs druidiques, … ?

Une partie de la réponse se trouve dans l’excellent livre “Histoire religieuse de la Bretagne” de Georges Minois aux éditions “Les universels Gisserot”.

Pour l’historien, le mouvement a été lent et plutôt tardif. Rien de bien significatif avant le VIIème siècle, pour un endoctrinement des masses au XIIème. La recette du succès ? Un recours presque systématique au syncrétisme pour incorporer les traditions ancestrales au dogme de Rome. Ce puissant ancrage permettra à la religion de se maintenir même dans les périodes les plus troublées de l’histoire flirtant allègrement avec les soubresauts des relations franco-bretonnes. Le choc de la révolution française sera d’ailleurs un facteur d’unification religieuse.

Un bel exemple de survivance des anciennes croyance avec ce l’ankou, de l’église Saint-Marc de l’Ile-Grande.

Le cheminement de l’adhésion de la population au culte n’a pas été de tout repos pour le colonisateur. S’appuyant sur un clergé de faible qualité, éloigné du dogme romain il aura fallut aux élites religieuses de très nombreux siècles pour former ses prêtres. De “l’ami” du début, le prêtre finit par se transformer en une personne austère, craint et respecté.

C’est finalement “l’évangélisation” du peuple à la science, au 19ème, qui mis réellement fin aux croyances celtiques. En effet, la force de cette religion ”réside dans son caractère désincarné”. “Seule la science peut venir à bout d’une religion des forces naturelles, en les expliquant”. “Il est très difficile à une religion de supplanter un tel culte : ni temple, ni idoles, ni textes sacrés à détruire; le vent, la pluie, la foudre, la lune, les sources, les pierres, les arbres, sont indestructibles. Le culte peut se dérouler partout, dans la lande, la forêt.”

Bonus : on trouve dans l’ouvrage une explication du nommage des villes bretonnes dont le mécanisme est particulière vrai à l’ouest, mais tend à disparaitre à l’est. Le nom d’un saint évangélisateur est associé à un préfixe pour former le nom d’un paroisse.

  • « plou » correspondent à un centre de peuplement : Iestin (Plestin), Edern (Plouédern), Armel (Plouarzel) …
  • « lan » ont pour origine un ermitage ou un monastère autour desquels se sont battis quelques maisons : Lanmeur, Langoat, …
  • « tré » est un hameau écarté qui donenra naissance à une nouvelle paroisse : Treberdun, Tregastel, …


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